- PALÉOCYTOLOGIE
- PALÉOCYTOLOGIEEn mettant un terme à une longue période d’affirmations inexactes sur la génération spontanée des êtres vivants, certaines idées, parfois anciennes comme celles de F. Redi (1668), Schwammerdam, Fontenelle, jusqu’à celles de Lazzaro Spallanzani, Theodor Schwann, Antoine Béchamp, L. Doyère et L. Pasteur au siècle dernier, ont abouti à poser de façon scientifique le problème des origines de la vie [cf. ORIGINE DE LA VIE]. Mais cela amène aussi à rechercher les premières formes de vie à l’état fossile: c’est la paléocytologie.Avant P. Becquerel, on avait pensé expliquer l’apparition de la vie sur la Terre par des germes venus d’autres planètes. C’est la théorie de la panspermie interastrale selon laquelle, de toute éternité, les mondes s’ensemencent entre eux. Cette idée de panspermie est fort ancienne. Elle remonte au philosophe grec Anaxagore (de 500 à 428 av. J.-C.) qui supposait que les êtres vivants provenaient des limons de la terre rendus fertiles par les abondants «germes de l’éther». La vie est partout dans l’Univers. La théorie a fait dire à P. van Tieghem, en 1884: «La végétation de la Terre a eu un commencement, aura une fin, mais la végétation de l’Univers est éternelle, comme l’Univers lui-même.» Les germes pouvaient être transportés sur la Terre avec les météorites, selon la théorie de la lithopanspermie défendue par Richter (1865, 1870), H. de Helmholtz et lord Kelvin, alors que selon une autre théorie due à Svante Arrhenius (1906) et appelée par Becquerel radiopanspermie – qu’ont défendue Gaston Bonnier et Jacques Loeb –, les déplacements se feraient par la pression des radiations lumineuses qui capturent les germes plus petits que leur longueur d’onde.En 1910 et 1911, Paul Becquerel réfute expérimentalement ces séduisantes hypothèses et démontre que les germes ne peuvent supporter les rigueurs des voyages interplanétaires sans être tués, notamment par les radiations ultraviolettes. Affirmant que la vie est une «... humble fille de la Terre», il adopte la théorie qu’il a désignée plus tard sous le nom de radiobiogenèse .D. Berthelot, en 1898, puis D. Berthelot et H. Gaudechon, en 1910, soulignent le rôle des réactions photochimiques dans la biogenèse. Plus tard, A. I. Oparin en 1924 et J. B. Haldane en 1929, en s’attachant à définir les conditions prébiotiques qui régnaient sur la Terre avant l’apparition de la vie, ouvrent les perspectives modernes qui seront ensuite affinées dans les théories plus récentes de J.-D. Bernal (1929-1932), de A. Dauvillier (1939-1947). Pour ce dernier, les substances organobiotiques sont dues au passage du gaz carbonique à la formaldéhyde sous l’action des rayons ultraviolets: c’est la biogenèse photochimique.Défendue, puis plus ou moins abandonnée, la théorie de la lithopanspermie a été cependant reprise avec l’étude des météorites. En 1961, G. Claus et B. Nagy voient dans des météorites carbonées, comme on l’a annoncé dans celles d’Orgueil (Tarn-et-Garonne), d’Ivuna (Tanzanie) et de Miguea (Ukraine), des éléments organisés rappelant les Algues, ce qui paraît excessif à beaucoup de minéralogistes et de micropaléontologistes, mais relance le débat.Pour éclairer les phénomènes initiaux de la biogenèse, ou biopoïèse, il est nécessaire de reconstituer le passé de l’atmosphère terrestre. L’ensemble des changements dont celle-ci a été l’objet, encore vivement discutés dans le détail, a conditionné de façon déterminante le développement des phénomènes vitaux, notamment l’évolution prébiotique .Cela posé, la paléontologie apporte des arguments essentiels pour établir l’origine de la vie cellulaire sur des bases solides à condition de prospecter, parmi les couches du Précambrien, celles qui ont échappé aux destructions du métamorphisme. Or, les fossiles qu’on y rencontre sont abondants, contrairement à ce que l’on a longtemps admis, et témoignent des modalités de l’évolution biologique à son départ.Il semble bien que durant tout le Précambrien, et surtout dans la période anoxique ou peu oxygénée des débuts, la vitesse d’évolution morphologique des êtres vivants ait été très peu marquée. Les sphéroïdes de la fin de cette longue période ne présentent en effet, avec les premiers témoins du début de la vie primitive, aucune différence perceptible malgré une différence d’âge de près de 3 milliards d’années! En revanche, en présence d’une atmosphère oxygénée, surtout dans les 500 derniers millions d’années, la vie a été particulièrement exubérante, évoluant parfois de façon explosive. Il n’est donc pas nécessaire de se reporter aux tout premiers fossiles du Précambrien inférieur pour retrouver les manifestations initiales de la vie qui ont parfaitement pu se répéter à différentes reprises pendant une durée aussi longue que le Précambrien.Il est certain que les tâtonnements physico-chimiques en direction de l’état vivant ont été nombreux, mais tous sont loin d’avoir réussi. Une partie relativement faible d’entre eux a pu aboutir à l’apparition de cellules véritables. Il faut donc s’attendre à rencontrer dans les différentes couches du Précambrien des formes fossiles jalonnant les phénomènes vitaux, arrêtés à divers moments de leur évolution.1. Paléocytologie procaryotiqueBactéries archaïquesLes cellules bactériennes dépourvues de noyau vrai sont typiquement procaryotes.E. S. Barghoorn et J. W. Schopf ont pu décrire (1966) Eobacterium isolatum , bacille de 0,5 憐 0,25 猪m, dans la microflore très ancienne du Fig-Tree (Afrique du Sud), datant de 3,2 milliards d’années.On retrouve ensuite des Bactéries à tous les niveaux du Précambrien, puis des dépôts sédimentaires plus récents, sans qu’on puisse percevoir des modifications morphologiques importantes. Il en est ainsi pour les Sidérobactéries oxydantes du fer et du manganèse, comme par exemple le Metallogenium personatum Perfil’yev (1962) dont les colonies étoilées faites d’éléments de 0,5 à 4 猪m ont un aspect caractéristique, avec une taille d’ensemble allant jusqu’à 20 猪m. Elles se présentent sous la forme de microdendrites ramifiées et plus ou moins allongées. Il est maintenant certain que les dendrites de manganèse ou de fer ont, dans beaucoup de cas, une origine bactérienne. Les Sidérobactéries actuelles ne sont pas aérobies ou se contentent de très faibles quantités d’oxygène. On conçoit alors qu’elles aient connu un très grand développement dans le Précambrien où l’atmosphère était, surtout au début, essentiellement réductrice.Les couches de Bulawayo, en Rhodésie (2,8 milliards d’années), ont livré des sphéroïdes dits «épineux» selon Oberlies et Prashnowsky et de 20 猪m de diamètre, qui sont sans doute, comme c’est le cas dans l’Ouest africain, des colonies de Metallogenium plus ou moins empâtées par un oxyde métallique d’où émergent les extrémités de leurs ramifications. Plus tard, vers 1,9 milliard d’années, dans la flore de Gunflint (Ontario), Barghoorn et Tyler ont signalé (1965) Eoastrion simplex et E. bifurcatum qui sont des organismes bactériens tout à fait comparables au Metallogenium personatum . Les «sphéroïdes épineux» ont été parfois, et à tort, considérés comme des Eucaryotes, en raison d’un diamètre de plusieurs centaines de micromètres. La flore de Gunflint a également livré des Sidérobactéries voisines des actuels Siderocapsa et Siderococcus (diamètre: 0,35 猪m) et des Sidérobactéries filamenteuses comparables en plus petit à Sphaerotilus natans (1,1 猪m-0,55 猪m).Dans le Précambrien terminal (de 1 milliard à 600 millions d’années) des Richât de Mauritanie, comme au Mali, à Korera, on retrouve en grande quantité des Sidérobactéries rappelant le Metallogenium personatum . En fait, tous les organismes du Précambrien dont le chimisme très souvent à base de fer et de soufre pouvait avoir élaboré les premiers complexes métalloprotéiques des chaînes d’oxydoréduction sont devenus par la suite abondants et omniprésents; les Bactéries apparaissent ainsi comme les organismes primordiaux qui ont précédé l’arrivée des autres êtres vivants.Coccoïdes et sphéroïdesDans le Précambrien, de très nombreux proto-organismes, en forme de sphérules de quelques micromètres désignés sous le nom de coccoïdes, dont l’aspect rappelle celui des cocci actuels, avoisinent souvent des sphéroïdes d’un diamètre comparable à celui des Cyanophycées, mais également des formations beaucoup plus grandes dépassant parfois largement le millimètre.Coccoïdes . Il est certain que les petites sphérules coccoïdes ne sont pas des formations minérales. Elles rappellent très fidèlement certains microcoacervats complexes, figurés par Oparin, ou si l’on veut les «monères», nom par lequel E. Haeckel désignait en 1866 des petites masses de «cytoplasme» homogène, sortes de protobactéries à noyau dépourvu d’enveloppe. Ces corps fossiles, dont le diamètre s’échelonne entre 0,5 et 4 猪m, correspondent assez bien aux microzymas de Béchamp (1869), aux bioblastes de R. Altmann (1896), aux microsphères de protéinoïdes de S. W. Fox (1965) et aux microgouttes de J. de Rosnay (1966).De nature glucidique, la paroi des coccoïdes comme le mucilage accompagnateur fréquent dans les fossiles des Richât sont très souvent colorables en carmin par le réactif de Schiff des aldéhydes, après oxydation par l’acide periodique (E. Boureau et M. Locquin, 1980).Sphéroïdes . Des sphéroïdes de 20 猪m ont été décrits dans la série du Fig-Tree commeArchaeosphaeroides babertonensis Schopf et Barghoorn, 1967, alors que d’autres de 106 猪m de diamètre ont été signalés dans la série plus ancienne dite d’Onverwacht également au Swaziland, en Afrique du Sud. De très grands sphéroïdes ayant à l’état fossile des caractères évidents d’êtres vivants peuvent atteindre un diamètre de 1 000 猪m, comme c’est le cas du Monodites princeps Boureau, 1977, des Richât de Mauritanie. Le caractère organisé d’un tel corps allongé, arrondi, subtriangulaire pourrait a priori être mis en doute. Par sa forme, il rejoint les «fioles» de 100 猪m des schistes de même âge du nord-est du Grand Canyon (formation de Kwagunt).Les organismes de 1 000 猪m ont un diamètre insolite si on les compare aux dimensions cellulaires modernes courantes. Ce grand corps allongé de 1 000 猪m doit sa signification d’être vivant surtout au pore qui figure à une extrémité et qui ne saurait avoir une origine minérale. Une telle modification de la paroi existe pareillement dans d’autres organismes vivants, assez différents, mais où elle a dû jouer le même rôle. C’est le cas des Levures bourgeonnantes montrant les deux sortes de cicatrices: la «bud scar» et la «birth scar». Les modifications morphologiques membranaires observées ici dans un organisme exceptionnellement grand semblent de même nature que celles qui ont été signalées chez les Levures, malgré une appréciable différence de taille et l’état eucaryote de ces dernières.Formes filamenteusesLa reproduction sériée de petits coccoïdes explique les files répétitives présentées par certains fossiles de la flore de Gunflint comparables aux Cyanophycées actuelles filamenteuses: Animikiea septata Barghoorn, 1965, Gunflintia minuta et G. grandis Barghoorn, qui ont été comparés aux Oscillatoria , alors que le Palaeorivularia ontarica Korde, 1958, est voisin des Rivularia . De nombreuses formes également filamenteuses ont été signalées dans un Précambrien plus récent par J. W. Schopf (1968) ainsi que par Schopf et J. M. Blacic (1971), notamment dans la flore des Bitter Springs, en Australie, et pareillement comparées aux Oscillatoriaceae et Rivulariaceae actuelles. Notons des formes rappelant les actuels Lyngbya comme Palaeolyngbya ou rappelant les Oscillatoria comme le font Oscillatoriopsis , Cephalophytarion , Partitiofilum , Filiconstrictosus , Obconicophycus ...Dans les Richât de Mauritanie, des groupes de sphéroïdes densément rassemblés avec une paroi commune ont été désignés sous le nom de Vesicularites saharianum .Dès le Précambrien, Bactéries et Cyanophycées voisines sont à l’origine de puissants récifs calcaires ou dolomitiques, de stromatolithes sphériques, lamellaires ou columnaires qui, en Afrique, atteignent une épaisseur de 3 000 m dans l’Adoudounien de l’Anti-Atlas et de même dans le Zemmour (600 m), dans l’Adrar de Mauritanie (150 m), dans la falaise de Hank (100 m), au nord du bassin de Taoudeni, ainsi qu’en dehors de l’Afrique et en de nombreux points du globe.Des stromatolithes se construisent même encore actuellement, notamment aux Bahamas.2. PaléocytologieeucaryotiqueDe nombreux documents paléontologiques fournissent des indications sur l’évolution cellulaire. Deux phénomènes simultanés peuvent être dégagés:– En premier lieu, l’émergence de la cellule eucaryote . Elle s’expliquerait par la transformation d’un sphéroïde collectif symbiotique différenciant ses composants en organites pour constituer la cellule eucaryote. D’autres éléments exogènes (Bactéries étrangères, Cyanophycées) ont pu être incorporés à la suite d’un actif fonctionnement de la paroi. On peut également expliquer le noyau. La disposition radiale des coccoïdes chez Asterosphaeroides laisse au centre un échantillonnage relativement hétérogène d’acide désoxyribonucléique provenant des éléments procaryotes de chaque rayon, constituant ainsi le futur noyau plus complexe d’une cellule eucaryote.– En second lieu, la tendance à la mitose . La production de substance extérieure de plus en plus réduite, qui aboutit ensuite à une émission simple rappelant l’amitose des Levures, devient à la limite franchement interne dans une mitose lorsque la cellule est devenue eucaryote. Une phylogénie de la mitose est ainsi mise en évidence avec toutes ses étapes à mesure que, parallèlement, s’élabore une cellule eucaryote avec tous ses organites.Complexité croissante des assemblagesDes coccoïdes jouent un rôle essentiel dans l’élaboration des sphéroïdes. Certains échantillons particulièrement favorables provenant du Précambrien terminal de Korera au Mali montrent des transitions significatives: 1. Des sphérules coccoïdes isolées sont parfois rassemblées en chaînettes, puis en petites colonies plus denses. 2. Des groupes de ces colonies sont souvent disposés en files courbes prolongées ou encore en un cercle fermé dont le centre est occupé par une substance claire. 3. L’ensemble s’entoure d’une première capsule périphérique commune mince. La partie centrale claire, s’enrichissant de façon continue, augmente de diamètre et, sous sa poussée, la paroi primitive du sphéroïde éclate, puis se reconstitue en soudant ses cassures. 4. Les colonies, toujours réparties en masses séparées et disposées en cercle, s’allongent perpendiculairement à la paroi commune, à l’intérieur du sphéroïde, en raison probable des contenus hydrophobes et hydrophiles de leur mucilage. 5. La structure radiée de l’ensemble plus ou moins sphérique ainsi réalisé caractérise Asterosphaeroides qui ne diffèrent les uns des autres que par leur diamètre et leur origine géographique (A. richatensis Boureau, 1970, Mauritanie, jusqu’à 260 猪m; A. emendatus Yakschin, 1972, Sibérie, 500 猪m). 6. Ces sphéroïdes subissent ensuite une évolution plus poussée. Le mucilage est produit en dehors de la paroi initiale qui devient de plus en plus complexe. De nouvelles couches concentriques externes s’additionnent alors à la périphérie donnant au sphéroïde la structure des Osagia Twenhofel, 1919 (par exemple, Osagia nersinica Yakschin, 1972, Sibérie). 7. Dans certains cas, la constitution de ces couches concentriques externes s’accompagne simultanément d’une incorporation de colonies sidéro-bactériennes qui se trouvent piégées, et l’on obtient alors une forme collective nouvelle plus complexe désignée sous le nom d’Asterosphaeroides darsii Boureau, 1976. Cette structure collective évoque un symbionte formé d’ensembles bactériens associés: les uns étant au centre fondamentalement endogènes, alors que les autres, à la périphérie, ont une origine exogène. Il faut noter que l’aspect sphérique et lamellé des membranes d’Asterosphaeroides darsii , qui est un sphéroïde en rapport avec des colonies bactériennes, se retrouve dans certains fossiles beaucoup plus récents ou même dans les oolithes actuelles purement minérales qui se sont construites autour de corps étrangers très différents (débris d’invertébrés, coprolithes, etc.).Remarquons qu’il n’y a aucun rapport entre le diamètre d’un sphéroïde et le fait qu’il ait seulement une paroi mince et lisse ou qu’il soit entouré de couches centrifuges concentriques complexes. Dans une même population, certains grands organismes de 200 猪m ont encore parfois une paroi simple et lisse, alors que certains sphéroïdes voisins de 20 猪m seulement, pourvus déjà de couches concentriques, sont des Osagia .De nombreux sphéroïdes, quelle que soit leur taille, observés en vue équatoriale comme les Asterosphaeroides , ont une anatomie comparable à celle des colonies bactériennes. R. Legroux et J. Magrou y ont mis en évidence (1920) une répartition particulière: ainsi les vibrions cholériques se présentent sous la forme de bâtonnets plus ou moins flexueux, rassemblés par groupes de vingt à trente rangés perpendiculairement à la surface de la colonie. L’orientation de ces formations rappelle fortement, à une autre échelle, celle des très longues files de coccoïdes qui caractérisent les Asterosphaeroides . Un autre type de colonie vivante décrit par A. R. Prévôt (1938) a été retrouvé dans Asterosphaeroides monodii avec ses filaments dressés extérieurement sur un sphéroïde interne.Ainsi, il est très vraisemblable que de nombreuses sortes de grands sphéroïdes, désignés sous le terme générique d’Asterosphaeroides par exemple, soient en réalité des colonies de coccoïdes.Ces sphéroïdes montrent parfois, plaqué sur leur surface, un réseau superficiel de Bactéries exogènes qui isole des cuvettes claires. Le réseau de Bactéries étrangères est incorporé de plus en plus profondément à mesure que la paroi s’accroît par couches concentriques, faisant passer le sphéroïde de son état simple Africanosphaeroides que caractérise son pore germinatif (ou Asterosphaeroides défini par son contenu de coccoïdes radiés) vers un état plus complexe, Osagia , que caractérise une paroi composée épaisse et lamellée. Les Bactéries exogènes s’ajoutent aux Bactéries endogènes fondamentalement à l’origine du sphéroïde primitif. Il s’agit alors en vue polaire de Babetosphaera africana Boureau et Monod, 1958, avec ses cuvettes claires.En outre, le sphéroïde simple initial peut être recouvert d’un ensemble différent, mucilagineux, cyanophytique de Nostocites vesiculosa Maslov, par exemple. Les cellules étrangères de cet autre organisme sont pareillement incorporées au cours de l’épaississement membranaire du sphéroïde initial et elles entretiennent parfois avec lui des relations cytoplasmiques rappelant celles des plasmodesmes. C’est le cas de Polysphaerula globulosa Boureau, 1975, grand sphéroïde de 250 猪m, en vue équatoriale, mais qui, en vue polaire, se présente encore comme un Babetosphaera africana avec ses cuvettes claires. On ne peut donc différencier les composants de ce dernier que par une coupe équatoriale. Le Babetosphaera africana , malgré son grand diamètre, se rapproche des Sphaerocongregus Moorman, 1973, signalés dans l’Alberta, au Canada et en Alaska (Allison et Moorman, 1973) et dont les colonies pyriteuses ont un diamètre qui varie de 5 à 16 猪m avec des cellules périphériques allant de 0,8 à 2 猪m. L’âge est pareillement précambrien terminal. Il s’agit vraisemblablement de formes également symbiotiques qu’on peut encore rapprocher des organismes dits «framboïdes» comme le Pyritosphaera barbaria de 35 猪m décrit par L. G. Love en 1962 dans le Carbonifère d’Écosse et retrouvé en 1963 par J. Duchesne dans le Cambrien des Ardennes. Elles peuvent également être comparées avec les globulites de 5 à 25 猪m décrits par N. S. Skripchenko, en 1968.Origine de la cellule eucaryoteIl est important de confronter ce que l’on sait maintenant de l’évolution et de l’origine des organismes collectifs du Précambrien qui apparaissent comme des symbiotes, avec certaines hypothèses déjà anciennes sur l’origine des cellules eucaryotes.Il faudrait d’abord se reporter à Antoine Béchamp (1869), un précurseur, père de la théorie des microzymas, qui considérait la cellule comme un agrégat de petits êtres.Les fossiles sphériques rappelant une cellule nucléée sont fréquents dans le Précambrien, mais il s’agit encore d’un pseudo-nucléus constitué par un assemblage de coccoïdes. Or, on avait depuis longtemps supposé que, dans la cellule eucaryote, le noyau représentait un dispositif bactérien (C. de Mereschkowsky, 1910), que les mitochondries étaient pareillement issues de Bactéries symbiotiques (R. Altmann, 1896; P. Portier, 1918) et que les chloroplastes provenaient de cellules de Cyanophycées initialement indépendantes (A. F. W. Schimper, 1885; C. de Mereschkowsky, 1920). Ces conceptions anciennes furent d’abord plus ou moins volontairement ignorées ou parfois combattues, mais elles furent à nouveau proposées lorsqu’on eut constaté que les chloroplastes et les mitochondries renfermaient de l’acide désoxyribonucléique qui peut leur conférer une certaine autonomie physiologique (L. Margulis-Sagan, 1967-1970).Notons cependant que cette théorie symbiotique dite encore théorie du micromérisme, qui considère la cellule eucaryote comme un endosymbiote et dont la réalité semble maintenant bien démontrée, a des racines encore plus lointaines qui remontent curieusement à Leibniz, Maupertuis et Buffon. Après une certaine éclipse, les idées de ces précurseurs furent remplacées par une autre théorie selon laquelle la cellule eucaryote était considérée comme une unité fondamentale insécable.J. William Schopf pense qu’on a des preuves très sérieuses d’une existence de cellules eucaryotes fossiles dans de vieux sédiments déposés quelques centaines de millions d’années avant le début du Phanérozoïque. Plus exactement, il évalue à moins de 1 500 millions d’années l’âge maximal des plus anciennes cellules eucaryotes.Les arguments invoqués ne sont pas toujours convaincants:– Dimensions de l’organisme . Le fait que certains organismes fossiles aient une grande taille connue seulement chez les Eucaryotes actuelles serait en faveur de leur existence à une époque aussi ancienne. Ainsi, les «fioles» de 100 猪m signalées dans les schistes du nord-est du Grand Canyon, formation de Kwagunt [(650), 800 (1 150) millions d’années] de même que les grands organismes de 2 mm découverts dans l’Utah (950 millions d’années) seraient nécessairement des Eucaryotes, étant, dans ce dernier cas, une trentaine de fois plus grandes que la plus grande Procaryote vivante actuellement connue. Il faut penser que ces formes de grand diamètre ne sont pas des cellules parvenues à l’état eucaryote, mais bien des colonies de petits éléments procaryotes non encore transformées (et peut-être même non transformables). Le plus souvent, il s’agit d’organismes collectifs sphériques qui possèdent toujours leur paroi périphérique mais ont en se fossilisant, plus ou moins perdu leur contenu bactérien. Toutefois, dans de nombreux échantillons de l’Ouest africain, un contenu bactérien a clairement persisté et c’est le cas de certains Asterosphaeroides provenant aussi bien des Richât de Mauritanie que du Mali (entre 1 000 et 600 millions d’années).– Argument du cloisonnement . Rien ne prouve que les filaments ramifiés à cloisons transversales nettes de la formation d’Olkine en Sibérie de (680), 725 (800) millions d’années appartiennent à des formes rappelant les Champignons ou des Algues vertes actuelles. Ce caractère septé que l’on retrouve dans Animikiea septata Barghoorn 1965, comme le caractère ramifié présent dans Archaeorestis schreiberensis Barghoorn 1965, pareillement dans la flore de Gunflint, ne sont pas nécessairement des caractères d’espèces eucaryotes.– Problème du «point noir». De nombreux sphéroïdes précambriens de différents diamètres possèdent un très important point noir , objet d’interprétations contradictoires. Ce détail est signalé d’abord en 1965 par E. S. Barghoorn et J. W. Schopf dans une légère invagination de la paroi des sphéroïdes provenant des Bitter Springs, en Australie centrale (peripheral dark body; eye spot? ).J. W. Schopf considère ce «point noir» comme un noyau cellulaire (1969), alors que P. E. Cloud, G. R. Licari et B. W. Troxel (1969) et plus tard D. Z. Oehler (1977) y voient un pyrénoïde, c’est-à-dire un de ces corps globuleux associés aux chloroplastes de certaines Algues.Il s’agit là d’interprétations capitales, car considéré comme étant un organite (noyau ou pyrénoïde), le point noir indiquait ipso facto une cellule déjà eucaryote. Par ailleurs, l’appréciation des processus évolutifs qui allaient s’ensuivre devenait nécessairement différente selon que l’on se trouvait en présence d’une cellule parvenue ou non à l’état eucaryote.Le point noir interprété comme un noyau avait entraîné la détermination, dans les couches des Bitter Springs, de Chlorophyceae (Algues vertes) et de Rhodophyceae (Algues rouges), comme pour le genre Glenobotrydion , Caryosphaeroides , Globophycus , alors que les Gloeodiniopsis étaient considérés comme des Phaeophyceae (Algues brunes) (J. W. Schopf et J. M. Blacic, 1971).Par exemple, le sphéroïde Glenobotrydion aenigmatis Schopf (de 7 à 12 猪m, en moyenne 9 猪m, sur 129 mesures) des Bitter Springs contient fréquemment un corps noir excentré avec un résidu cytoplasmique et des poches membraneuses.Pour D. Z. Oehler (1977), le corps noir ressemble en microscopie électronique à un pyrénoïde inclus dans l’amidon, les poches membraneuses associées pouvant être des restes de chloroplastes. Cet auteur en conclut que le Gl. aenigmatis était un eucaryote et probablement une Algue verte.Il faut souligner que tous les organismes précambriens des Richât de Mauritanie, ayant le diamètre des Cyanophycées actuelles ou une plus grande taille, ont une même origine bactérienne. Le point noir visible dans les sphéroïdes de diamètre allant de 40 à 420 猪m, désignés sous le nom d’Africanosphaeroides fertilis , est un pore germinatif en raison des émissions de substance traversant son ouverture (E. Boureau, 1970-1973). De plus, il est observable de profil, ce qui montre qu’il résulte manifestement d’une simple interruption de la paroi. Le point noir ne signifie donc pas que le sphéroïde correspondant soit une cellule eucaryote déjà élaborée.Pareillement, en 1973, G. Kremp ne voyait nullement un noyau dans cette particularité.– Disposition en tétrades . D’autres fossiles pouvaient laisser supposer la présence d’espèces eucaryotes. Il s’agit de sphéroïdes groupés en tétrades et désignés sous le nom d’Eotetrahedrion princeps qui, selon Schopf et Blacic (1971), démontreraient l’existence de phénomènes sexuels consécutifs à une méiose. La disposition en tétrades est très probablement fortuite et ne prouve pas non plus de façon suffisante la présence de cellules eucaryotes (Boureau, 1975).Ces «tétrades» provenaient des Bitter Springs dans le centre de l’Australie (740), 850 (950) millions d’années et également, d’après J. W. Schopf (1978), des dolomies d’Amelia à (1 300), 1 500 (1 375) millions d’années dans le nord de l’Australie.Par ailleurs, des sphéroïdes collectifs rappelant le Sphaerocongregus , formé d’unités procaryotes, peuvent également être groupés en tétrades.Vers la mitose: les émissions de substancesLes substances émises par un sphéroïde ont acquis un développement très inégal, et un nombre varié de nouveaux sphéroïdes s’y différencient. Ce nombre peut être grand; mais il est fréquent d’observer un sphéroïde unique issu du pore germinatif. Il apparaît alors comme un bourgeonnement simple, une amitose, phénomène courant dans de nombreux gisements d’âge très différent dans le Précambrien.Il semble bien que les points noirs qu’accompagnent souvent des émissions de substances existent dans des organismes d’un diamètre très différent, allant de 1 000 猪m chez le Monodites princeps Boureau à un diamètre beaucoup plus faible chez l’Huroniospora microreticulata Barghoorn, très petit sphéroïde de la flore de Gunflint figuré par D. G. Darby (1974) et également comparé à des Levures en cours de reproduction par bourgeonnement. Huroniospora psilata (5 猪m 憐 3 猪m) avait déjà été signalé par Barghoorn et Tyler, 1965, avec, à une extrémité, une ouverture très nette, mais ces rapports avec un point noir n’avaient jamais été établis. Les pores d’Huroniospora ont également été indiqués en 1968 par Licari et Cloud. Un certain nombre d’autres microfossiles précambriens déjà décrits et montrant soit des ouvertures, soit des émissions de substances par bourgeonnement, appartiennent pareillement aux genres Synsphaeridium Eisenack, Protosphaeridium Timofeev, Trachysphaeridium Timofeev, Pterospermopsimorpha Timofeev, Menneria Lopuchin, Hymenophacoides Roblot (cf. Vidal, 1976), Palaeocryptidium Deflandre (cf. Pacltova, 1972), Birrimarnoldia antiqua Hovasse et Couture, 1961.La mise en évidence des émissions de substances à travers le pore germinatif a un certain nombre de conséquences significatives, quelles que soient les dimensions des sphéroïdes émetteurs: 1. La forme de l’émission est en général fonction de l’espace disponible laissé par les sphéroïdes déjà différenciés dans le voisinage immédiat. 2. Le volume de l’émission s’accroît par adsorption des substances extérieures plus ou moins riches situées dans cet espace disponible, l’ensemble pouvant se comporter comme un système thermodynamique ouvert. 3. Le pore, qui a fonctionné pendant un temps déterminé, peut être oblitéré par des parois nouvelles internes ou externes accolées à la première paroi du sphéroïde qui, dans de nombreux cas, devient une oolithe plus ou moins complexe. 4. Très fréquemment, le sphéroïde émetteur perd peu à peu son contenu qui s’entoure alors d’une paroi interne nouvelle, de sorte qu’il n’est pas rare de rencontrer à l’intérieur de sphéroïdes de toutes tailles qui se vident partiellement plusieurs parois sphériques excentrées autour du pore germinatif. 5. Le pore germinatif dont la forme varie considérablement, depuis la simple interruption par rupture sous la poussée du contenu du sphéroïde jusqu’à un dispositif très différencié, est souvent accompagné d’un petit îlot sombre, de toute évidence sidérobactérien, qui donne sa couleur au point noir. Cet îlot sombre est nettement figuré par Oehler en 1975-1977, mais il est considéré par cet auteur comme un pyrénoïde. L’îlot sombre, en rapport avec l’interruption de la paroi, est d’ailleurs probablement lié aux processus enzymatiques responsables de la lyse membranaire et comparables à ceux qui ont été mis en évidence chez les Levures. 6. Le Kakabekia umbellata de 12 à 30 猪m, décrit par Barghoorn dans la flore du Gunflint comme un organisme tripartite, peut parfaitement être interprété comme un sphéroïde en cours d’émission de substances.Un tel dispositif est fréquent. On le retrouve dans le Précambrien des Richât de Mauritanie avec une taille d’ensemble variable allant jusqu’à 160 猪m (Stellasphaeroides similaris Boureau, 1975). Plus tard, le Dévonien supérieur du Sud tunisien a livré une forme comparable de 85 猪m. On l’a même signalée à l’état vivant dans le pays de Galles avec un diamètre de 4 猪m (Kakabekia barghoorniana S. M. Siegel et B. Z. Siegel, 1968). Dans ces formes, le sphéroïde émet dans un espace restreint une ombelle généralement étoilée dont les côtés concaves épousent les bords convexes des sphéroïdes voisins déjà différenciés dans le voisinage immédiat. On observe assez souvent dans certains autres sphéroïdes un pincement médian de la paroi, alors que le contenu, localisé d’abord dans une première moitié, s’étend ensuite dans la seconde.On constate ainsi que, dans les sphéroïdes collectifs plus ou moins transformés, les émissions de substances par le pore germinatif sont dans certains cas d’abord nettement externes et développées, qu’elles se réduisent ensuite peu à peu et qu’elles deviennent de plus en plus internes pour finalement l’être complètement, évoquant une véritable mitose, lorsque le sphéroïde collectif a fait place à une cellule eucaryote parfaitement élaborée. Une telle succession d’émissions, d’abord franchement externes, puis devenues de plus en plus internes illustre en quelque sorte une phylogénie de la mitose.En fin de compte, la première apparition d’organismes eucaryotes, qui ait été démontrée avec certitude, date de 600 millions d’années avec la faune d’Ediacara, en Australie. L’état de différenciation déjà avancé de cette faune primordiale implique nécessairement une évolution antérieure assez longue. On peut logiquement supposer que les premières cellules eucaryotes sont apparues vers la fin du Lipalien, au plus ancien vers approximativement 700 millions d’années, ou peut-être seulement vers 650 millions d’années.«Humble fille de la Terre», comme le disait Paul Becquerel en 1911, la vie du vaste globe a pris naissance aux dépens d’éléments inertes. Malgré cette affirmation clairement démontrée, on ne peut penser que la machinerie complexe d’une cellule eucaryote ait pu provenir directement d’un coacervat, même très riche. On est conduit à admettre qu’une telle cellule compliquée est constituée d’unités fondamentales plus simples, comme peuvent l’être certains coccoïdes primitifs connus à l’état fossile. La cellule vivante eucaryote serait une colonie d’éléments secondairement modifiés. Tous ces faits militent en faveur de la théorie symbiotique ou micromériste et on voit en outre tout l’intérêt d’un apport concret de la paléobotanique qui dispose d’un paramètre privilégié irremplaçable: le temps géologique.D’ailleurs, il y a d’autres conceptions qui ne font que déplacer le point de départ de la vie. En effet, on peut supposer une origine extraterrestre de la vie en appuyant la théorie de la panspermie cométaire. Il s’agit d’une forme de panspermie interastrale qui néanmoins peut paraître étrange. Elle est défendue par des auteurs récents, comme Francis Crick, prix Nobel, découvreur de la double hélice de l’ADN.Les chercheurs, convaincus que la vie a une origine extraterrestre, voient dans une comète un véhicule itinérant idéal, capable de transporter les germes d’un monde à l’autre. On a été jusqu’à imaginer que l’ensemencement de la Terre ou des autres planètes par des micro-organismes avait pu se faire grâce à un vaisseau spatial envoyé par une civilisation lointaine inconnue; l’identité du «progénote» reste problématique (cf. Forterre, 1992).On s’est demandé si des traces subsistaient, dans le passé, après le passage de telles comètes. C’est ainsi qu’on a pu dater, en tenant compte des données de la radioactivité sur la Lune, aux environs de — 4 milliards d’années une importante catastrophe qui concernait la Lune, et probablement en même temps la Terre. Cette catastrophe aurait peut-être permis l’arrivée des premiers germes prébiotiques sur la Terre.La découverte des propriétés autocatalytiques de l’ARN, puis celle des aptitudes autoréplicatives de l’ADN en absence d’enzymes (Nature , 14 mai 1994), suggère la nécessité que ces germes renferment des acides nucléiques. C’est pourquoi F. Crick envisage comme possible un ensemencement des autres planètes pour y introduire des formes de vie nouvelles: c’est le projet de la panspermie dirigée.paléocytologie [paleositɔlɔʒi] n. f.ÉTYM. XXe; de paléo-, et cytologie.❖♦ Sc. Science du contenu cellulaire des végétaux fossiles.
Encyclopédie Universelle. 2012.